Un coup de vent anti-éolien est depuis quelques mois en
train
de monter en puissance dans le département de l'Allier, et
il est soutenu
par quelques militants écolos antinucléaires dont
je suis. Je vous situe
maintenant ma démarche personnelle.
Ex-ingénieur
dans l'armement
nucléaire, militant antinucléaire depuis plus de
30 ans, autoconstructeur il y
a plus de 20 ans d'une maison solaire bioclimatique, militant dans
l'agriculture bio, les déchets, organisateur de foires bio,
éco-artisan
Qualisol depuis près de 10 ans, j'ai toujours
été favorable aux énergies
renouvelables.
Jusqu'à
présent, l'énergie
éolienne me semblait pertinente car c'est une
énergie propre, capable de
fournir une quantité très importante
d'électricité, et qui pourrait permettre,
en complémentarité avec d'autres
énergies renouvelables, de remplacer
rapidement le nucléaire.
En janvier dernier, un ami
écolo de longue date est venu
me demander d'épauler son association contre le projet
d'implantation d'éoliennes
dans sa commune, qui est proche de la mienne. Le fait d'apprendre le
récent
développement de projets éoliens dans notre
département du nord de l'Auvergne
m'a rendu perplexe car nous habitons dans la zone la moins
ventée de France.
Cela
m'a poussé à réaliser sur
Internet une longue recherche justifiant la pertinence de
l'éolien dans notre
département, et là j'ai découvert en
quelques jours de nombreux sites et des
centaines de pages critiquant le développement de
l'éolien dit industriel.
Après
l'étude de notre politique
énergétique nationale à travers
l'examen d'environ 200 fichiers provenant du
Ministère de l'Economie des Finances et de l'Industrie, de
RTE (Réseau de
Transport de l'Electricité), d'EDF, d'associations
s'opposant à l'éolien, et
d'informations glanées à l'étranger,
je souligne ici les principaux éléments
qui ont fait évoluer mon jugement.
Pour limiter l'effet de serre, il faut au
plus vite réduire drastiquement
notre consommation d'énergies
Actuellement
le facteur
environnemental le plus préoccupant est le
réchauffement climatique (cela
ressort dans les sondages,) et notre consommation boulimique
d'énergie en est
le principal responsable.
Début
Mars 2009, le GIEC vient de réviser à la hausse
ses prévisions,
et un réchauffement global de la planète de
6°C est prévisible à la fin du
siècle, ce qui aurait des effets dramatiques sur notre
environnement.
Il
est important de souligner que
nous produisons annuellement en France 9 tonnes de CO² par
habitant alors qu'il
faudrait très rapidement descendre à 2 tonnes,
soit 4,5 fois moins pour
stabiliser la concentration en CO² de l'atmosphère,
ce qui représente un
challenge colossal.
Il
est donc impératif de réduire
drastiquement, et en seulement quelques dizaines d'années,
notre consommation
d'énergies fossiles.
Les mesures d'économies
d'énergie ont été un échec
En
France, nous ne constatons
depuis les années 1990 aucune baisse significative de nos
émissions de CO².
Le
"Plan soleil
2000-2006" et les autres mesures d'économie
d'énergie n'ont donc pas été
efficaces, or les aides de l'Etat ont pourtant
été conséquentes, surtout en
crédit d'impôt.
Un
exemple local, en Auvergne, le
Plan Soleil 2007 ne représente que 0,03%
d'économie annuelle en énergie.
Le Grenelle de
l'environnement, qui propose une réduction
de 20% de nos émissions de CO² en 2020 est
très timide, et dans ces conditions
il faudrait au moins un siècle pour atteindre l'objectif de
réduction de nos
émissions de CO².
Le
Grenelle de l'environnement
propose aussi un développement massif des
énergies renouvelables, mais est-que
ce développement est réellement pertinent?
Les énergies renouvelables sont
beaucoup moins efficaces que l'isolation
En
janvier 2007, le Ministère de
l'Economie des Finances et de l'Industrie annonce que le coût
budgétaire brut
d'une tonne de CO² évitée est 150 (cent
cinquante) fois plus élevé pour le
solaire thermique que pour l'isolation thermique des parois opaques.
En
2008, une
étude de l'Université de Mons montre que la
première mesure à mettre en œuvre
c'est l'isolation, vient loin derrière le solaire thermique
puis enfin le
photovoltaïque. La question sur la pertinence du
photovoltaïque est débattue au
Parlement Wallon.
Cette
année, l'étude McKinsey prouve que
l'investissement pour réduire nos émissions de
CO² est une solution
immédiatement rentable pour l'isolation, et que pour la
biomasse et l'éolien,
elle est environ 8 fois moins coûteuse que pour le
photovoltaïque.
Le programme éolien est
inopérant pour réduire nos émissions
de CO²
Notre
programme éolien c'est l'installation
de 12000 à 15000 éoliennes en 2020, d'une
puissance totale de 28500MW. Il
permettrait d'assurer la production d'environ 10% de notre consommation
d'électricité, soit 2,5% de notre consommation
totale d'énergie.
Ce
programme, qui pourrait atteindre
les 75 milliards d'euros, c'est nous consommateurs qui le financerons à travers la
CSPE (Contribution aux charges
de Service Public de l'Electricité) de nos factures EDF.
Selon
l'ADEME, à son échéance,
notre production totale de CO² serait au mieux
réduite d'environ 3%, mais selon
l'Académie des technologies, au delà d'une
puissance éolienne de 15000MW, il y
aurait davantage de CO² produit qu'actuellement car il faut
bien avoir présent
à l'esprit que lorsque des parcs éoliens de
puissance importante s'arrêtent, la
consommation d'électricité ne se
réduit pas obligatoirement, et qu'alors des
centrales thermiques polluantes doivent progressivement prendre le
relais.
Avant de remplir un tonneau
percé, il faut boucher les trous
Notre politique
énergétique consiste toujours à
produire
davantage d'énergie : lancement de plusieurs EPR, programmes
massifs d'énergies
renouvelables (éolien, photovoltaïque, etc.), sans
trop se préoccuper
d'économiser l'énergie. Il est vrai qu'il est
davantage flatteur pour un ministre,
d'inaugurer une centrale photovoltaïque de plusieurs
mégawatts, qu'un bâtiment
isolé par l'extérieur, même si les
modules photovoltaïques proviennent de Chine
alors que l'isolation est produite localement.
La
centaine de milliards d'euros
qui va être injectée dans l'éolien et
le photovoltaïque serait davantage
efficace dans l'isolation, mais aussi dans l'efficacité
énergétique et la
substitution énergétique. Sans oublier des
secteurs de recherche complètement
ignorés en France comme les isolants sous vide ou la
micro-cogénération
Stirling.
Enfin,
il faudrait avoir en
permanence à l'esprit que l'énergie la plus
économique est celle que l'on ne
consomme pas.
Voilà
les principales raisons
pour lesquelles je suis devenu anti-éolien, ou
plutôt contre le plan éolien,
car l'éolien pourrait être efficace, mais
seulement dans le cadre d'une toute
autre politique énergétique.
Jean-Louis
Gaby Mai 2009
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